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Par Gilles Trudeau ARP rédacteur agréé et trésorier de la SQRP

Sujet impérissable à la SQRP, le tarif horaire ou forfaitaire des rédacteurs préoccupe beaucoup de membres qui travaillent à leur compte. Plusieurs ont demandé au conseil d’administration de se prononcer sur la question, ce qui ne se produira pas. Nous en discutons régulièrement, cependant. Au cours de notre réunion du 28 octobre 2014, mes collègues m’ont demandé de rédiger une courte réflexion sur le sujet. Les lignes qui suivent n’engagent que leur auteur même si j’agis comme trésorier de notre humble et vaillante société.

D’entrée de jeu, pour ceux et celles que le sujet obsède, je ne vois pas d’autres moyens de mettre fin à vos interrogations que de vous documenter sur le sujet. Il existe plusieurs ouvrages. Pour moins de 20 dollars (version numérique), je vous conseille l’essai de Marc Chiasson et Marie Brouillet intitué Comment facturer mes services, publié aux Éditions Transcontinental en 2004. Même si les auteurs s’adressent à des consultants, vous y trouverez de précieux conseils à titre de rédacteur, notamment dans les chapitres traitant de grille tarifaire et d’offre de service.

Des mandats, des contextes et des tarifs en conséquence

Le tarif d’un rédacteur est un sujet pluridimensionnel. Pour ma part, j’ai des tarifs variés, qui vont presque du simple au double. Les écarts s’expliquent par les divers contextes des mandats. Je vous en propose trois, mais il y en a des dizaines.

  • Contexte 1. Vous écrivez en sous-traitance pour une agence de publicité. Votre client refacturera vos services avec un profit de 20 à 50 % selon les usages. Votre tarif sera donc au plus bas. Vive la pub!
  • Contexte 2. Vous écrivez une chronique hebdomadaire de 700 mots pendant un an. Vous consentirez un tarif de volume ou un forfait, donc plus bas que votre tarif normal. Vive la régularité!
  • Contexte 3. On vous confie une importante allocution pour le PDG d’une grande entreprise. Votre client s’attend à bénéficier d’une bonne expertise quant au sujet abordé, ou d’une compétence reconnue dans la rédaction d’un discours percutant et réussi. Votre client acceptera certainement de vous payer plus cher que son plombier. Vive les discours!

Vous avez saisi que le sujet de la tarification est complexe. Il est lié à votre expérience, à vos compétences transversales, au type de client qui vous engage et aux multiples contextes de travail pour lesquels on vous demande d’écrire.

Je vous connais cependant! Cette réponse ne vous convient pas tout à fait. Vous allez me demander : « Entre le moins cher et le plus cher, comment déterminer mon tarif courant? » Ma réponse de trésorier est toute… comptable! Voici un exercice tout simple du calcul d’un taux horaire.

  1. Établissez votre revenu annuel anticipé.

Pour ce faire, voici quelques indications de base. Sachez d’abord que le salaire minimum au Québec est de 21 500 dollars pour une semaine de 40 heures, mais que le salaire moyen se situe autour de 42 000 dollars par année. Si vous êtes membre agréé de la SQRP, cela signifie que vous avez fait des études universitaires et que vous considérez que vous méritez mieux. Je ne vous blâme pas. Je vous concède alors un salaire de 50 000 dollars par année. Et puis non. Soyons positifs, audacieux, entrepreneurs, et fixons-nous un objectif de 60 000 dollars, tiens!

 

  1. Établissez ensuite vos frais pour faire des affaires.

 

Connaissez-vous vos coûts pour faire des affaires? Voici une liste partielle des principaux postes budgétaires : ordinateurs, téléphone intelligent, tablette, imprimantes (y compris papier et cartouches), chaise de travail, télécopieur, bureau, livres de référence, logiciels, automobile (pour la partie affaires), déplacements (essence), restaurants, etc. Tiens, je vous octroie 20 000 dollars par année. Évidemment, je ne parle pas des impôts que vous aurez à payer sur vos revenus, je m’en tiens strictement aux coûts pour faire des affaires.

 

  1. Combien d’heures allez-vous facturer ?

 

Plusieurs gestionnaires évaluent à 1 250 heures par année le nombre d’heures normalement facturables d’un professionnel, ce qui équivaut à 24 heures par semaine si vous ne prenez jamais de vacances! D’accord, je vous donne quatre semaines de vacances – vous le méritez bien – ce qui nous ramène à 26 heures de facturation par semaine.

 

Avec toutes ces données, votre tarif horaire de base devrait être de 64 dollars. Le calcul est simple : 60 000$ + 20 000$ / 1 250 heures = 64$. Évidemment, vous devrez manier la calculatrice si vous ne parvenez pas à facturer 26 heures par semaine! Tous les calculs sont possibles (moins d’heures, tarif plus élevé), mais vous devez les faire au risque de ne pas pouvoir vivre convenablement de vos écritures. Ah, la vie de scribe!

Un 5 à 7 pour saluer l’automne

Chers collègues et amis de la SQRP,

En ce début d’automne, que diriez-vous d’une sympathique rencontre entre collègues et amis de la SQRP afin d’aborder l’année 2014-2015 en beauté?

Nous vous donnons rendez-vous, le lundi 29 septembre prochain, à compter de 17 h 30, au Café du Nouveau Monde, 84, rue Sainte-Catherine Ouest, Montréal, à l’angle de la rue Saint-Urbain. Il s’agit du Café-Bar du Théâtre du Nouveau Monde.

Nous avons réservé un espace devant le bar pour nous retrouver. Il n’y a pas de frais d’entrée, chacun paie ses consommations. Ceux qui voudront manger au restaurant après le cocktail sont les bienvenus! Ce sera l’occasion de rencontrer d’autres membres, de réseauter, mais aussi… d’échanger et de rigoler.

RSVP à reneesenneville@live.ca, en indiquant le nombre de personnes qui vous accompagneront (n’hésitez pas à inviter vos proches et amis). Prière de nous informer de votre éventuelle intention de souper avec nous, après le 5 à 7, de manière à ce que nous puissions vous réserver des places.

Inscrivez-vous!
Au plaisir de vous compter parmi nous!

Le comité Services aux membres de la SQRP

Toutes nos félicitations à Claire Michaud, présidente sortante de notre association, qui s’est mérité le titre de membre d’honneur.

Membre de la SQRP depuis 2004, membre de son conseil d’administration de 2006 à 2013, d’abord comme secrétaire puis, de 2009 à 2013, comme présidente, notre amie et collègue a contribué de façon exceptionnelle à l’essor de notre Société. Claire Michaud devient ainsi la sixième personne à détenir le titre prestigieux de membre d’honneur de la SQRP.

Félicitations et bienvenue à nos 22 nouveaux consœurs et confrères, qui ont réussi l’examen d’agrément annuel, qui s’est tenu le 15 février dernier. Un bon nombre d’entre eux ont d’ailleurs participé à la cérémonie d’accueil, le 22 mai, comme on peut le constater sur notre page Facebook.

Voici les noms de ces 20 rédactrices agréées et 2 rédacteurs agréés : Catherine Baudin, Suzanne Beauchamp, Nicole Beaudry, Monique Bourget, Sylvie Cameron, Lucie Couasnon, Amélie Cournoyer, Marie-Claude Ethier, Linda Fatigba, Mélissa Guay, Jasmine Laurent, Flôrilène Loupret, Rosana Martinez, (M.) Dominique Nadeau, Isabelle Naël, Silvana Nahman, Claire Neveux, Marie-Claude Pageau, Line Prévost, Céline Trépanier, Julie Vaudry et Louis Philippe Vézina.

Du côté de Québec, un souper amical a eu lieu le mercredi 11 juin au restaurant Aux deux violons. Les nouveaux membres de la région ont alors eu l’occasion de rencontrer leurs collègues et de faire plus ample connaissance.

(Réédition d’un texte de Jean Dumas tiré de sa série Enquête)

Le texto comme dernier avatar de l’écriture

Depuis l’antique plume d’oie jusqu’au clavier du téléphone intelligent, l’écriture continue sans cesse sa progression dans les rapports interpersonnels, faisant ainsi mentir les prévisionnistes qui la croyaient foutue. À l’ère de l’écran tactile – « les gens ne lisent plus » –, l’alphabet n’aurait plus jamais la cote. Le numérique lui assènerait son dernier coup, lui riverait son dernier clou.

C’est tout le contraire qui survient sous nos yeux. Au point où nombre de gens se servent moins de leur accès téléphonique sans fil pour converser directement que pour s’écrire. Où est donc passée la société audiovisuelle qu’on nous annonçait? Ce revirement nous concerne au premier chef, nous les rédacteurs, puisque, par profession, nous sommes des gens de l’écriture. Nous nous pensions peut-être les derniers témoins d’une époque en déclin, alors que nous serions plutôt les chefs de file d’un temps qui naît.

 1. L’écriture permet de communiquer sans trop se compromettre

L’écriture est née à des fins d’archivage et d’inventaire, conformément au proverbe : « Les paroles s’envolent ; les écrits restent. » Mais dès que les supports commencèrent à devenir plus maniables (de la pierre à l’argile, puis des lanières de peau au papyrus), on commença à lui trouver une vocation de moyen de communication facile.

L’invention du papier devait la démocratiser pleinement et en faciliter l’usage comme instrument d’échanges interpersonnels. À l’origine de cette nouvelle vocation, le choix de l’écriture comme moyen de communiquer entre proches résultait simplement de leur éloignement momentané. Lisez les lettres des amoureux célèbres d’autrefois qui ne cessaient de répéter : « Ah ! Je brûle de vous retrouver. » Autrement dit : « J’écris parce que c’est le seul moyen que j’ai de vous déclarer mes sentiments. »

L’écriture amplifie l’élan des sentiments

Mais ces sentiments étaient mis à rude épreuve dès que les amants se retrouvaient. En effet, leurs tête-à-tête s’avéraient souvent moins romanesques que leurs échanges épistolaires. Quelle déception, alors, de se retrouver devant un partenaire dont les rapports amoureux se situaient bien au-dessous de ce qu’avait laissé entrevoir sa façon d’écrire. En langage d’aujourd’hui on parlerait de second degré. Couchés sur papier, les sentiments se donnent le temps de fouiller dans les dictionnaires pour dénicher le mot juste qui les dilatera en vue de séduire le destinataire. La médiatisation des émotions par l’écriture a donc pour effet d’amplifier leur élan naturel pour les rendre plus efficaces. Il devient ainsi possible de titiller à distance les sens de l’être aimé.

À l’inverse, la parole, parce que spontanée, s’inscrit dans le premier degré, la réaction immédiate, irréfléchie. D’où ces phrases hachurées et désordonnées des échanges oraux que complètent l’animation du visage et la gestuelle. Il ne viendrait à personne l’idée de parler comme on écrit. C’est tellement le cas que, chaque fois qu’on entend quelqu’un disserter doctement dans le cadre d’une simple conversation, on dit qu’il « s’écoute », qu’il « récite », qu’il lit des phrases écrites dans sa tête.

L’écriture réduit les heurts affectifs

L’écriture établit donc une distance entre les interlocuteurs ; ce qui se vérifie notamment dans les dialogues teintés d’agressivité. Comparez, à cet égard, les discours bien léchés – bien rédigés – des politiciens et leurs hésitations et balbutiements quand ils sont invités à débattre face à face.

Cette distance a l’avantage de réduire les chocs entre interlocuteurs. La personne qui écrit a le loisir de choisir les mots qui rendront adéquatement sa « pensée ». De son côté, celle qui lit a tout son temps pour digérer le message et préparer son argumentaire de retour ; ce qui ne lui est pas possible à l’oral où l’émotion embue rapidement la raison.

Les prises de bec enflammées font le pain et le beurre des thérapeutes de couples, qui s’attardent moins aux sujets de discorde abordés qu’au choix des mots, au ton de la voix, à l’allure du visage et au langage des gestes. L’écrit camoufle cet affolement sous une couche de formules présentables.

En conséquence, si vous voulez dialoguer sans trop vous compromettre, en vous gardant une marge de manœuvre, écrivez ce que vous vous proposez de communiquer. Écrire vous permettra d’exprimer vos sentiments selon une progression délibérée et par petites doses comestibles. Ainsi aurez-vous transfiguré la réalité brute en artisanat.

2. Les gens d’aujourd’hui ont besoin de la distance que favorise l’écriture

L’autonomie nous a affranchis des entraves qu’imposaient les sociétés corsetées. Chacun est désormais libre de penser comme il le veut, d’agir comme il l’entend. Et c’est bien ce qu’il fait. On n’avance plus en coupes réglées. À bas les hiérarchies ! Toute relation est un contrat d’égal à égal.

Mais à quel prix? De la solidarité largement partagée dans les collectivités monolithiques d’hier, il ne reste plus que quelques fragments vécus au sein de la famille nucléaire… originale ou reconstituée. Par ricochet, en l’absence de cette précieuse balise que constituait le « groupe », c’est l’isolement qui guette.  Une telle situation est particulièrement évidente dans les grandes villes où tant d’inconnus se côtoient dans l’indifférence, chacun étant occupé à poursuivre sa réussite personnelle et sa propre qualité de vie. Solitude dans la foule. Déficit de communication.  « Déficit de communication », avez-vous dit? Les créateurs des médias électroniques y ont pensé en même temps que vous.

Alors, ils vous ont pourvu d’un outil pratique qui vous permettait de parler à qui vous vouliez, n’importe quand et n’importe où. Ils avaient perçu votre besoin impérieux de quitter l’insularité. Le succès astronomique de leur portable a bien montré qu’ils avaient vu juste.

S’éloigner du bruit de fond

Mais tout remède comporte sa part de contre-indications. Et, semble-t-il, personne n’a pris le temps de lire les directives. C’est ainsi que tout le monde s’est mis à parler à tout le monde en même temps, créant ainsi une invraisemblable cacophonie. Vous étiez toujours aussi seul. Étourdi, en plus, par une information surabondante, incontrôlable.

Ce qu’il vous faut – vous l’avez finalement compris –, c’est la possibilité de communiquer quand vous le souhaitez, mais aussi la capacité de vous isoler quand le bruit de fond est trop perturbant. Vous avez décidé de vivre sans maître? Il ne sera pas dit que vous deviendrez esclave d’un téléphone. Votre situation n’est pas facile. Vous voulez échapper à la dépendance, mais avez quand même besoin de chaleur humaine. Vous ne souhaitez donc pas vous priver de toute relation ; vous tenez simplement à garder une certaine distance entre vous et l’autre de manière à conserver votre autonomie. Or, il existe une façon éprouvée d’assurer cet équilibre dans vos communications : l’écriture.

3. CONCLUSION : l’écriture répond bien aux attentes de notre époque

Qui a dit qu’écrire devait se faire absolument sur du papier ? Qui a prétendu que le style d’un texto devait reproduire nécessairement celui d’une missive? Ce qu’il faut plutôt retenir de l’écriture d’aujourd’hui, c’est qu’elle conserve toujours, dans n’importe quel contexte, la fonction qui lui fut de tout temps si utile : assurer une certaine distance entre des interlocuteurs.

L’écriture d’aujourd’hui est un hymne à la liberté. Liberté d’échanger à son propre rythme, liberté de transformer en point de contact affranchi cet outil d’assujettissement que constitue le combiné téléphonique.

Souvenez-vous : à l’origine, le téléphone mobile ne comportait qu’un clavier embryonnaire. Le succès instantané de son application « texte » incita les fabricants à la développer, puis à en faciliter l’utilisation… jusqu’à l’associer récemment aux sites de dialogue les plus fréquentés, comme Facebook ou Twitter. De toute évidence, cette application-là répondait à un besoin latent.

Vous voulez vous affranchir des sonneries intempestives qui prennent votre quotidien en otage? Mais, en même temps, vous ne voulez pas perdre le contact avec votre milieu de vie? L’écriture est la réponse toute trouvée. Vous voulez assurer votre autonomie sans rompre les liens avec la société? Faites de l’écriture votre moyen privilégié de communication. Vous voulez vous donner un temps de réflexion avant de répondre à votre interlocuteur? Rien ne saurait remplacer l’écriture.

 Réfléchir pour mieux dire

« Mais pourquoi s’écrivent-ils encore? » avons-nous demandé en tête de cet article, alors que les gens ont pourtant la possibilité de communiquer beaucoup plus rapidement par voie orale. Ce peut sans doute être pour des raisons pratiques. Mais, à notre avis, la vraie raison est ailleurs.

Nous croyons que, pour plus d’un, c’est d’abord pour s’assurer un espace de liberté, se protéger de l’envahissement. En s’astreignant au lent déroulement de mots (relativement) bien écrits et de phrases (plus ou moins) bien construites, l’on établit une certaine distance avec le correspondant. Façon d’échanger qu’on peut situer quelque part entre la conversation à bâtons rompus et la composition classique.

Sage distance, qui permet l’éclosion de relations plus réfléchies. Vertu du deuxième degré qui humanise les rapports humains. Qui ne s’en réjouirait pas? Cette dynamique particulière de l’écriture, le rédacteur professionnel la connaît bien. Il ne peut donc qu’être heureux de la découvrir si largement « tendance ».